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Des masques en tissu à l'officine ?

Les masques alternatifs aux dispositifs médicaux sont au centre des réflexions dans la stratégie de lutte contre le Covid-19.

© adobestock_ sutichak

En coton ou synthétiques, intégrant un filtre découpé dans un sac pour aspirateur ou un mouchoir en papier, avec élastiques lacérant les oreilles ou à nouer grâce à des liens… Sur les réseaux sociaux, les recettes ne manquent pas pour fabriquer des masques « faits maison », sans aucune garantie d’efficacité cependant. Et si chacun y va de son propre pas-à-pas (centres hospitaliers compris, comme le montre le site exhaustif stop-postillons.fr), c’est qu’aucune autorité scientifique ne s’était jusque-là prononcée sur les critères à respecter pour produire un dispositif efficace. Pire, l’utilisation de ces moyens de protection primaire a longtemps été considérée comme totalement facultative, voire contre-productive, à l'opposé des habitudes prises dans les pays asiatiques. Cependant, dans le contexte actuel de pénurie généralisée, ces masques dits « alternatifs » commencent à intéresser les autorités : ils pourraient permettre de réduire la demande en masques médicaux dont les stocks sont toujours en tension, tout en contribuant à limiter la propagation du virus dans la population générale. Vendredi 3 avril au soir, dans son allocution quotidienne, le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, a évoqué l’évolution de la doctrine gouvernementale : « Nous encourageons le grand public, s’il le souhaite, à porter […] ces masques alternatifs qui sont en cours de production. »  Et de reconnaître, le lendemain : « Depuis le début de cette épidémie, nous apprenons chaque jour. Nous adaptons notre position, nous évaluons. »

Tutoriels validés

Dans le même temps, l'Académie de médecine a pris position en faveur des masques « alternatifs » : elle plaide pour une obligation d’utilisation de ces dispositifs lors des « sorties nécessaires en période de confinement », assortie d'un maintien de cette obligation lorsque le confinement sera levé. L’Académie demande également que « les indications pratiques pour la fabrication d’un tel masque soient largement portées à la connaissance de la population », citant le tutoriel utilisant une serviette en papier, réalisé par le Pr Garin, ancien chef du département de virologie du Centre de recherche du service de santé des armées ou celui nécessitant une feuille d’emballage de stérilisation proposé par la Société française de sciences de la stérilisation. On notera cependant que dans ce dernier cas, la matière première n’est pas à la disposition du premier « couturier du dimanche » venu. De son côté, l’Afnor met à disposition gratuitement un référentiel élaboré par ses experts pour guider celles et ceux qui disposeraient des matériaux et des compétences pour se lancer dans la confection artisanale ou en série de masques dénommés « barrières ». De nombreux schémas sont proposés dans le document ainsi que des patrons prêts à l’emploi.

Vers la commercialisation

Si les questions autour des normes à respecter pour fabriquer des dispositifs non médicaux efficaces semblent réglées, il n’en va pas de même pour celles entourant les circuits de commercialisation de ces masques. En l'état actuel des textes législatifs, ils ne figurent pas sur la liste limitative des marchandises dont les pharmaciens peuvent faire le commerce dans leurs officines. Ces derniers vont-ils être autorisés à les vendre ? C’est en tout cas la vo­lonté de nombre d'entre eux. Ca­rine Wolf-Thal, pré­si­dente du Conseil national de l'Ordre des phar­ma­ciens et Phi­lippe Bes­set, pré­sident de la FSPF, notamment, sou­tiennent cette op­tion au­près des pou­voirs pu­blics. « L’officine doit pouvoir répondre aux attentes légitimes des patients qui ne peuvent bénéficier de masques médicaux pour l’instant », estime ainsi Philippe Besset, qui souhaite que les prix de ces masques soient réglementés.

Par Alexandra Chopard

6 Avril 2020

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