Ni la Haute Autorité de santé (HAS) – qui a estimé en 2015 que le service médical rendu de la molécule était insuffisant –, ni l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) n'ont eu raison de l'olmésartan. Cet antihypertenseur, soupçonné de provoquer des entéropathies rares mais graves pour un gain en morbimortalité non prouvé, devait pourtant être déremboursé au plus tard le 4 juillet prochain, soit trois mois après la publication au Journal officiel des décisions de déremboursement, le 3 avril dernier. Pour rappel, les spécialités concernées sont : Olmetec, CoOlmetec, Sevikar (Daiichi Sankyo) ainsi que Alteis, Alteisduo et Axeler (Menarini). Mais les juges du Conseil d'État, saisis par les laboratoires concernés, ne l'ont pas entendu de la même oreille en suspendant dès à présent cette mesure de déremboursement, dans deux ordonnances distinctes – disponibles ici et là –, le jugement sur le fond devant arriver dans les prochains mois.
Trop peu de switchs
Pourquoi une telle urgence ? Selon des données de la direction générale de la santé (DGS) communiquées avec la décision du Conseil d'État, à début juin les prescriptions d'olmésartan n'avaient diminué que de 10 %. Un mois avant l'échéance des déremboursements, les juges ont donc craint l'arrêt brutal du traitement pour une majorité de patients et estimé que le gouvernement n'avait pas laissé assez de temps pour ménager une transition thérapeutique sereine, ce qui « jette un doute sur la légalité des arrêts ». Le Conseil d'État suspend également dans la foulée les documents de la HAS et de l'ANSM mentionnant ce délai. Le gouvernement dispose de deux semaines pour modifier les arrêtés du 3 avril dernier et repousser la date de déremboursement à une échéance « qui ne saurait être antérieure au 31 décembre 2016 », et doit dans l'intervalle largement communiquer sur ces nouvelles dispositions. On notera tout de même que les magistrats du Palais-Royal ne contestent pas les motifs du déremboursement, à savoir le risque d'entéropathies propre à cette molécule. L'olmésartan vient en tout cas de s'octroyer au moins six mois de sursis... Reste à expliquer aux patients les raisons de ce retournement de situation.