Le colloque sur le bon usage du médicament qui s'est tenu le 22 mars à la Maison des pharmaciens, à Paris, a mis en exergue la volonté du système de santé d'agir contre la iatrogénie médicamenteuse, qui entraîne 10 000 morts et 130 000 hospitalisations tous les ans. Il fut aussi l'occasion d'interroger la ministre de la Santé, qui ouvrait l'événement, sur le sujet brûlant de l'automédication, suite à l'enquête de l'Union fédérale des consommateurs (UFC)-Que Choisir. Agnès Buzyn a tenté de préciser sa position : « Je n'ai pas de doctrine affirmée sur ce sujet : je pense que les pharmaciens peuvent parfaitement jouer un rôle de conseil sur les produits sans prescription, c'est le cas pour 90 % des pharmacies, mais je m'inquiète des 10 % de pharmacies situées dans une gare ou un aéroport, qui, en raison du passage, n'ont plus le temps de rendre ces conseils. »
Plus aucun mort
Cet argument n'est pas neuf, puisque la ministre avait déjà tenu de tels propos. Mais l'actualité le fait résonner différemment : « C'est pour cette raison que j'ai décidé au mois de juin de lister les médicaments à base de codéine. Vous remarquerez que plus aucun enfant n'est mort de surdosage depuis ; je ne regrette donc pas cette décision. » Agnès Buzyn reconnaît ne pas avoir « suffisamment instruit » le dossier du conseil officinal : « J'ai quand même une inquiétude en tant que médecin. Certains médicaments sans prescription sont [commercialisés] à des doses potentiellement toxiques. Je pense notamment à certains AINS, au départ vendus à des doses de 100 mg ou 200 mg et qui le sont maintenant à 800 mg. […] je ne comprends pas cette dérive. » Impossible de savoir à quelle molécule la ministre pensait exactement mais après que la pseudoéphédrine a failli être elle aussi listée, décision qui a finalement abouti à une interdiction de la publicité, ses propos ne resteront certainement pas sans suites.