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Du nouveau au pays des robots

La tendance est à la démocratisation des robots et automates dans les officines, avec le lancement de machines toujours plus compactes à des prix plus abordables.

Par Hélène Bry

© ADOBESTOCK_BESJUNIOR

Plus be­soin d’être gros pour s’of­frir un ro­bot. La di­zaine de construc­teurs du sec­teur, que nous avons in­ter­ro­gés sur leurs toutes der­nières nou­veau­tés, ont bien com­pris cette soif de dé­mo­cra­ti­sa­tion du côté des phar­ma­ciens, prêts à cas­ser leur ti­re­lire – mais pas trop ! – pour op­ti­mi­ser leur fa­çon de tra­vailler et leurs gains, mieux gé­rer leur stock, ga­gner du temps de pré­sence au comp­toir et éven­tuel­le­ment de la place. D’au­tant que, mé­ca­ni­que­ment, une fois les plus grosses phar­ma­cies équi­pées, ce sont les pe­tites et moyennes qui de­viennent le nou­veau ter­ri­toire à conqué­rir pour les fa­bri­cants.

Pe­tits mais cos­tauds

Et les nou­velles offres se bous­culent. BD Rowa lance, pour 54 900 eu­ros, son Smart 120 dont l’ar­gu­ment mas­sue est d’être fa­cile à ca­ser puis­qu’il ne me­sure que 1,20 m de large. Sa­rah Chelba, qui a ra­cheté la phar­ma­cie de la place de Lé­vis à Pa­ris (XVIIe), est la pre­mière équi­pée de ce mo­dèle en France : « Pour une of­fi­cine à 1 mil­lion d’eu­ros de chiffre d’af­faires (CA), ache­ter un ro­bot au­tour de 100 000 eu­ros n’au­rait pas été rai­son­nable, mais là, j’ai sauté le pas », ex­plique celle-ci, qui a pris un lea­sing sur sept ans. « Avant de m’ins­tal­ler, j’ai tra­vaillé dans des phar­ma­cies avec ou sans ro­bot et il n’y a pas photo ! Il ab­sorbe la par­tie la plus ré­bar­ba­tive de notre tra­vail : al­ler sans ar­rêt der­rière cher­cher une boîte, ­perché sur un es­ca­beau. D’au­tant que les pa­tients sont de plus en plus im­pa­tients : dès qu’il faut at­tendre, beau­coup s’en vont. Le ro­bot fait vrai­ment ga­gner du temps et on reste au comp­toir tan­dis que les mé­di­ca­ments tombent ­derrière nous », confie-t-elle en ta­pant une or­don­nance, ac­tion­nant quasi ins­tan­ta­né­ment, en back-of­fice, l’ha­bile pince qui s’em­pare de la bonne boîte sur la bonne éta­gère dans un vrom­bis­se­ment fu­tu­riste.
Même ordre de prix pour la plus pe­tite ver­sion du nou­veau ro­bot, lui aussi stan­dar­disé, d’Om­ni­cell, le RDX Es­sen­tial, qui pré­sente une lar­geur fixe d’1,61 m mais peut être ­décliné en 7 lon­gueurs et 3 hau­teurs. « On est en train de voir com­ment on pour­rait le ­rétrécir d’en­core 20 cm, donc 2,30 m de haut, car les of­fi­cines fran­çaises sont sou­vent basses de pla­fond », glissent Jean-Pierre Pe­tiot et Luc Hoff­mann, respec­tivement di­rec­teur com­mer­cial re­tail et mar­ke­ting ma­na­ger d’Om­ni­cell. Nou­velle offre en vue aussi chez Goll­mann, qui ne ré­siste pas à évo­quer son nou­veau bébé at­tendu pour Phar­ma­gora 2020 : la sé­rie com­pacte et haut de gamme GO.édi­tion, à par­tir de 75 500 eu­ros, « équi­pée d’un mo­dule ca­pable de char­ger 100 boîtes en six mi­nutes », ex­plique Ma­rius Bueb, di­rec­teur com­mer­cial France-Bel­gique. La so­ciété Me­di­tech a, quant à elle, dé­ve­loppé en 2019 une ver­sion moins haute (2,36 m) de son MT.​XS qui équipe déjà 57 of­fi­cines, à par­tir de 60 000 eu­ros. En­fin, l’Ita­lien La­bel Pharma com­mence à vendre en France son Me­dis­tore Brilliant (1,69 m de large) à par­tir de 60-70 000 eu­ros…
Les au­to­mates ne sont pas en reste et dé­fendent aussi leur place. Le Belge Tecny­Farma lance ainsi en France son Su­per Speed Light +, pe­tit au­to­mate ra­pide à ta­pis, à par­tir de 33 000 eu­ros. Et les deux poids lourds du sec­teur, Mé­ka­pharm et Phar­max, pro­posent aux pe­tites phar­macies des so­lu­tions dès 45-50 000 eu­ros. 

At­ten­tion à la main­te­nance

« Pour une pe­tite phar­ma­cie, choi­sir un ro­bot ou un au­to­mate dé­pend des ob­jec­tifs et des contraintes de chaque of­fi­cine : si je veux pri­vi­lé­gier le contact avec le client, op­ter pour un ro­bot a du sens, no­tam­ment si j’ai un seul sa­la­rié et des plages ho­raires seul avec mon ro­bot. Mais si ma prio­rité est d’être ra­pide et de ser­vir da­van­tage d’or­don­nances si­mul­ta­né­ment, l’au­to­mate est plus adapté et coûte beau­coup moins cher en main­te­nance », plaide Sté­phane Ni­zard, pré­sident de la so­ciété Phar­max. La ques­tion de la main­te­nance est en ef­fet cru­ciale et doit être étu­diée en amont. Car avec un ro­bot en lea­sing sur cinq ou sept ans, il fau­dra sou­vent comp­ter dans les 500 eu­ros par mois pour l’amor­tir, aux­quels il convient d’ajou­ter entre 300 et 500 eu­ros par mois pour sa main­te­nance (plu­tôt au­tour de 150 eu­ros pour un au­to­mate). « His­to­ri­que­ment, ro­bots et au­to­mates va­laient très cher et étaient ré­ser­vés à des grosses phar­ma­cies à 2 ou 3 mil­lions de CA. Au­jour­d’hui, on as­siste à une réelle dé­mo­cra­ti­sa­tion, avec une telle concur­rence que les ma­chines sont toutes très per­for­mantes. D’au­tant que le bond tech­no­lo­gique ef­fec­tué ces der­nières an­nées est consi­dé­rable. La dif­fé­rence se fait plu­tôt sur la main­te­nance, la pos­si­bi­lité de pou­voir joindre les gens un di­manche…, ana­lyse Serge Ar­zou­ma­nian, di­rec­teur de l’in­ven­to­riste Stock 12. Mais il faut bien ré­flé­chir avant de sau­ter le pas car à moins de 1,5 mil­lion de CA, éco­no­mi­que­ment, ­partir sur un ro­bot, ce n’est pas im­pos­sible mais c’est tendu. »
Et « il est vrai, ajoute Sté­phane Ni­zard de Phar­max, qu’une grosse phar­ma­cie avec un gros dé­bit amor­tira plus vite son ro­bot. Mais à l’heure où les pe­tites of­fi­cines ont ten­dance à fer­mer, pa­rier sur un ro­bot ou un au­to­mate semble un bon choix ­stratégique pour, jus­te­ment, ré­sis­ter ». « Au­jour­d’hui, les phar­ma­ciens sont un peu cha­hu­tés sur leurs marges, alors l’un des élé­ments qui peut leur per­mettre de faire des éco­no­mies, c’est la ro­bo­ti­sa­tion », ar­gu­mentent Jean-Pierre Pe­tiot et Luc Hoff­mann d’Om­ni­cell. « L’idée est de ga­gner sur la par­tie back-of­fice en sup­pri­mant les co­lonnes-ti­roirs et en dé­ga­geant de la place en front-of­fice pour la pa­ra­phar­ma­cie, très ren­table. » Sa­rah Chelba, dans le XVIIe, a ga­gné 20 mètres car­rés en sup­pri­mant les 12 co­lonnes-ti­roirs du pro­prié­taire pré­cé­dent. Elle en a pro­fité pour ins­tal­ler un pe­tit lo­cal pour vac­ci­ner. « Un ro­bot fait aussi ga­gner en sé­cu­rité et ges­tion du stock : pas de pos­si­bi­lité d’er­reurs de do­sages quand les boîtes sont quasi iden­tiques puisque les codes Da­ta­ma­trix sont scan­nés », conclut-elle, tout en ques­tion­nant le ro­bot sur les boîtes qui vont se pé­ri­mer en pre­mier pour les écou­ler en prio­rité. « Et la nuit, sou­vent, je le laisse al­lumé pour qu’il op­ti­mise le ran­ge­ment des boîtes pen­dant que, moi, je dors. »

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