On n’achète pas une voiture à 70 000 euros sans être monté dedans. » Un principe que Philippe Comte, titulaire à Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence), applique aussi… à l’acquisition d’un robot, après avoir œuvré pendant plusieurs années au sein de l’Association des utilisateurs de robots et d’automates créée par son père, Yves Comte. Bertrand Veau, qui a installé dans son officine à Tournus (Saône-et-Loire) un robot tout automatique équipé d’un bras double (voir « 3 questions à », ci-dessous), le confirme : « Il importe de libérer du temps pour rendre visite à des confrères qui se sont équipés. »
Définir ses besoins
Encore faut-il trouver un voisin dont l’officine a une configuration proche de la sienne et ne pas comparer, par exemple, une pharmacie de quartier avec celle d’un centre commercial, ou une pharmacie équipée d’un robot derrière les comptoirs alors que vous avez de l’espace libre au sous-sol. Ensuite, le futur acquéreur devra être attentif à la façon dont range le robot du confrère (voir encadré ci-dessous), et à quel moment (avant ou pendant les heures d’ouverture ?). Il pourra observer à quel rythme il délivre, en particulier aux heures de pointe, et si la machine est encombrée. Ou encore s’interroger sur le nombre de sorties en fonction du nombre de comptoirs, sur les possibilités d’intervention manuelle du pharmacien en cas de panne et sur les délais d’intervention du fabricant.
Avant même la visite au confrère, le pharmacien doit évaluer financièrement, par exemple grâce à un miniprévisionnel réalisé avec son expert-comptable, s’il a la capacité de faire face à cet investissement. Selon les fabricants, une pharmacie peut s’automatiser à partir de 3 millions d’euros de chiffre d’affaires (CA). Toutefois, « pour une pharmacie plus petite, avoisinant 1,5 million de CA, mais saisonnière et débordée pendant les vacances, la robotisation peut aussi valoir le coup », analyse Pierre Jégou, agenceur en pharmacie.
De fait, le chiffre d’affaires n’est pas le seul critère, indique Laurent Cassel, associé du cabinet d’expertise-comptable Adequa : « L’acquisition d’un robot s’intègre souvent dans un projet plus global : je voudrais développer mon CA de 10 %, le robot va- t-il me le permettre ? Est-ce que je souhaite que le robot, en me faisant gagner du temps en personnel, m’apporte une meilleure qualité de délivrance ? Est-ce que je veux agrandir ma surface de vente, auquel cas je réorganise mon espace de stockage avec un robot ? » Les plus prévoyants pourront également réfléchir à la capacité future de la machine : « Si la pharmacie évolue, pourrais-je ajouter de nouvelles références ou bien la machine sera-t-elle saturée dès son installation ? », suggère Philippe Comte.
Prévenir les idées reçues
Parmi les points de vigilance, pour les pharmacies délivrant fréquemment de longues ordonnances, sachez qu’« un robot délivre moins vite à la ligne puisque son bras va chercher boîte après boîte », souligne Philippe Comte. Dans ce cas de figure, prévoir un second bras peut s’avérer nécessaire.
Autre écueil possible, se dire : « j’automatise pour gagner la place des tiroirs colonnes », relève Olivier Résano, directeur commercial chez Mékapharm, fabricant. À moins d’une délocalisation en étage, il faut prévoir qu’un robot est volumineux, « entre 6 et 8 mètres de long, 1,5 mètre de large et 2,5 mètres de haut », note Pierre Jégou. L’idéal, selon lui, est de placer la machine au dos des meubles d’OTC, ce qui évite les inconvénients de la « transitique » : un coût d’installation qui augmente de 10 % (longueur du tapis, insonorisation…) et des délais d’acheminement des boîtes plus longs.
Dernier point à prendre en compte, loin d’être un détail : la maintenance. En effet, « si les prix des robots ont baissé de 20 à 50 % ces dix dernières années, le coût de la maintenance, à l’inverse, a fortement augmenté », précise Philippe Comte. Elle s’élève en moyenne entre 3 et 8 % du prix de l’appareil ; aussi ne faut-il pas hésiter à la négocier. Rien n’est jamais complètement automatique.